Résidence sénégalo-française : et si on inversait les rapports Nord-Sud?

 

Initialement prévue dans le cadre de l'Agora des coopérations & des solidarités internationales, une résidence de co-création s'est tenue du 8 au 13 décembre à Montpellier avec la venue de Mamadou Diol, metteur en scène sénégalais et fondateur de la Compagnie Kaddu Yaraax.

 

Avec lui, les membres de la troupe de théâtre-forum Agropolis se sont interrogés sur les rapports Nord-Sud. Sur la base d'une scène construite il y a quelques années, ils les ont explorés en mouvement au cours de 4 ateliers de co-création guidés et mis en scène par M. Diol. 

Cette résidence a abouti à la saynète "L'Afrique aide les Nords", présentée au grand public lundi 13 décembre 2021 à Agropolis International. L'occasion de changer de regard et de nourrir les réflexions quant à nos postures dans les "projets de développement" !


Un projet réalisé par les troupes de théâtre-forum d'Agropolis et Kaddu Yaraax, en partenariat avec CoTéAct, Agropolis International, Com4Dev et le soutien de la Région Occitanie.

Ci-dessous un article dans le Monde qui parle de M. Diol . Il parle d’ailleurs de la résidence que la troupe Agropolis avait organisée avec lui et sa Compagnie il y a 12 ans en 2010.

 

Une première en wolof

En Afrique, cet anniversaire sera fêté par une grande première : la création du Doctor Ci Lu Dul Coobarem, Le Médecin malgré lui, en wolof. On le doit à Mamadou Diol, une figure du théâtre sénégalais. Avec le Kaddu Yaraax, sa compagnie fondée en 1994, ce metteur en scène de 55 ans a jusqu’alors présenté des pièces d’intervention collective, portant sur des sujets politiques et sociaux. Mais il n’a jamais monté de pièces du répertoire. Sa passion pour Molière s’est ancrée dans une tournée en France, qui l’a conduit il y a dix ans à Pézenas (Hérault), grande étape dans l’itinérance de la troupe de Molière dans les années 1650.

« Au Sénégal, Molière est connu du monde du théâtre, mais pas au niveau populaire, explique Mamadou Diol. J’ai lu une centaine de fois Le Médecin malgré lui, et à chaque fois je me voyais dans un township de Dakar, tant les thèmes de la pièce sont proches de ce que l’on vit aujourd’hui. La pandémie a désorganisé la structure sociale, de violentes émeutes ont eu lieu en mars. A travers Le Médecin malgré lui, on peut aborder l’industrialisation de la médecine liée au coronavirus, la solitude face à la maladie, l’exploitation de l’ignorance de la masse qui ne sait pas lire et qu’on éblouit avec des mots compliqués. » Dans ce contexte, traduire la pièce en wolof a une dimension culturelle évidente. « C’est même incroyable, souligne Mamadou Diol, on a l’impression que la pièce a été traduite par Molière du wolof en français : on trouve des structures de langue et de style communes, et tous les personnages pourraient sortir de notre société. »

Le Kaddu Yaraax espère pouvoir jouer dès qu’il y aura une période d’accalmie de la pandémie, « pour faire revenir le rire que le Covid nous a volé ». Il le fera dans son théâtre de Dakar, mais aussi sur les places, dans les villes et villages. Pour Mamadou Diol, cette première de Molière en wolof a aussi une portée politique : « Placer le wolof dans le même registre que toutes les langues dans lesquelles Molière a été traduit, de l’anglais au finnois ».